jeudi 25 avril 2013

Sacrifice du buffle dans un village Katu

J'ai de la chance.

Quelques jours après être arrivée au Laos, je pars explorer les régions de l'est, un petit trek en terrain
"mon village" pour quelques temps
bien escarpé, caillouteux et glissant...et c'est la chute. Mon genou vrille vers l'extérieur, douleur aiguë, mais il faut continuer, redescendre vers le village, encore deux heures de marche, alors bien sur, ça n'arrange pas les choses.
Durant la nuit, la douleur est atroce, la personne qui m'héberge chauffe des feuilles de bananier et en entoure mon genou. J'ai plutôt besoin de froid, de glace, mais il n'y en a pas dans le village, alors je laisse faire. Le lendemain, mon genou a doublé de volume, impossible de marcher, pas de médecin à moins de 2 heures de route, les villageois font venir le chamane. Je suis assise par terre (avec les

Avec ma béquille, vêtue du Sin
traditionnel
membres de la famille) il me regarde, mon genou est couvert par un sin (sarong), secoue la tète, il souffle (de loin car il est resté debout) sur mon genou, s'adresse à la dame qui me loge et s'en va.
Pas de grands gestes, pas d'incantations, de fumée ou autre cérémonie obscure, je suis déçue ! ;-)
Bon, pas non plus d'atèle ou de soin quelconque, je suis déçue ! ;-)
Par contre, il faut payer... car il n'est pas parti, il attend son paiement à l'extérieur, pas de générosité gratuite, je suis déçue ! ;-)


Mais non, allez, c'est pas vrai, je ne suis pas déçue, je vais me reposer quelques jours ici avant de prendre une décision quand à la suite de mon parcours. En fait je suis même loin d'être déçue, je suis dans un village au bord d'une rivière, la vie est tranquille, les habitants me fabriquent une béquille en bois, rustique mais efficace, tout le monde est aux petits soins pour moi. C'est plutôt chouette, j'ai de la chance !


Les repas quotidiens
Je reste 15 jours dans ce village. 15 jours à partager la vie quotidienne des habitants.



Cuisson du riz collant, à la vapeur,
dans un panier en bambou.
J'observe la préparation des repas: tous les jours on cuit le riz collant, à l'extérieur, sur un petit feu. Parfois on grillera un poisson ou un morceau de poulet, mais les repas sont surtout composée de
riz et de légumes sautés. On mange assis par terre et on pioche dans le plat commun. La maison où je loge a une pièce avec du carrelage, quel luxe, c'est moins poussiéreux que les maisons au sol de terre battue.




la recette est simple, il suffit d'écraser
les feuilles avec la pierre...
...Puis de se frotter le visage avec.


Les femmes m'aident à me rendre à la rivière pour la toilette.
J'apprends à cueillir les feuilles d'un arbuste, pour les piler avec un cailloux, on les utilise comme recette de beauté pour le visage.







J'observe les pêcheurs et leur technique si particulière. Ils placent des espèces de nasses en bambou et, perchés sur leur radeau (de bambou aussi), ils frappent l'eau pour rabattre les poissons vers le piège.

toboggan naturel, c'est quand même
 mieux qu'aqualand non ?


Les enfants eux, passent leur temps à faire des glissades dans la boue.





Le matin, j'observe le défilé des femmes des villages du plateau environnant. Ce sont des Katu, alors que le village ou je suis est un village Lao. Elles viennent vendre des légumes et des fruits qu'elles portent dans des hôtes de bambou. Elles s'arrêtent devant les maisons, déposent leur chargement, et les habitants viennent fouiller et acheter ce qui leur plaît. C'est comme un mini marché devant chez vous ! Les traditions vestimentaires se perdent, elles sont, pour la plupart habillées comme les Lao, mais on repère tout de suite leurs "cigarettes"...immanquable !

Ce sont les villages Katu que je voulais aller voir lors de mon trek écourté à cause de me chute. Mais j'ai de la chance !

les femmes fument des énormes cônes
 de tabac brut
Car en plus de l'opportunite de partager la vie du village pendant ma "convalescence", les Katu  qui rigolent bien, chaque jour, de me voir avancer avec ma jambe de bois m'invitent à la fête de leur
village qui aura lieu dans quelques jours.



déballage de la récolte devant les maisons


















Les Katu sont animistes, c'est à dire qu'ils croient aux esprits.
 Leurs villages sont d'ailleurs construits autour de la maison des esprits, qui sert uniquement lors des cérémonies rituelles. La maison des esprits se trouve toujours a milieu d'une grande place vide,
les décors peints des maisons des esprits
entourées de piquets en bois.

""totem" Katu dans les maisons
des esprits














La construction traditionnelle est en bois et toit en herbe, mais, maintenant, de plus en plus souvent, celui ci est remplacé par un toit de tôle ondulée. Les décors peints sur les cotés ainsi que les "totems" varient d'un village à l'autre. Le phallus est cependant un point commun, puissance, fertilité, chasse, longévité ? je n'en connais malheureusement pas la signification exacte.




Bref, je suis invitée à une fête ce soir, je trouve donc un villageois qui veut bien m'y conduire dans son vieux camion. Je découvrirai, arrivée sur place qu'en fait de nombreux villageois sont venus car




Les paris d'argent, surtout pour les enfants
Le gamin a gagné les cigarettes
le lao-lao coule à flot, et, ici, toutes les occasions sont bonnes pour boire l'alcool de riz. Arrivée au village, Je découvre une ambiance kermesse avec des jeux  principalement pratiqués par les enfants.
Il y a les jeux d'argent: un tapis posé au sol où on place ses paris...un peu comme à la roulette, mais sans roulette, on gagne de l'argent, personne ne s'offusque de l'âge des joueurs....
Il y a le jeu du paquet de cigarette que l'on doit faire tomber dans la jarre, on gagne le paquet de cigarettes, personne ne s'offusque de l'âge du joueur...




Le système d'éclairage public de la fête, rudimentaire mais efficace.
Non, non, il ne neige pas, les particules que vous voyez sur la photo
c'est de la poussière !
Que fait cet homme assis sur sa moto...il tient la chandelle ?
Non, il tient l'éclairage: une ampoule suspendue à une perche, genre canne à pèche lumineuse !

L'ambiance est assurée par une sono à fond, enfin... surtout les grésillements à fond !
Il y a foule, et on a du mal à respirer tellement l'atmosphère est saturée de poussière. Et oui, les villages ont tous des rues en terre uniquement, alors avec la foule qui piétine, c'est vite irrespirable !

Avec ma béquille, je suis un peu une attraction, moi aussi. Ici, les gens se moquent ouvertement des infirmes ou des
handicapés, je ne fais pas exception.  J'ai du mal à avancer, dans le noir, sur un sol très irrégulier, avec toujours un petit groupe de curieux qui m'entourent, mais j'arrive finalement au milieu du village, devant la maison des esprits. Et là, je comprends le pourquoi des piquets en bois qui l'entourent.





Les décorations en bambou, suspendues
 devant chaque animal


Chaque piquet est décoré de sortes de guirlandes en bambou, et, à chaque piquet est attachée un boeuf, le piquet du milieu, lui, est pour le buffle. Les animaux seront sacrifiés.
 La cérémonie va commencer, les hommes se préparent et se parent.



Bien sur, le 21eme siècle est là, et les tenues traditionnelles sont plutôt en voie de modernisation. C'est donc par dessus des shorts de foot et T-shirts fluos que les hommes revêtent leur ceinture brodée et s'emparent de leurs armes: une épée et un bouclier rond.
La cérémonie commence avec des chants, le sacrifice d'un oiseau et des danses dans la maison des esprits au son des tambours. Les danses continueront ensuite à l'extérieur, les hommes dansant autour de chaque animal. Toutes les 5 minutes environ, ils s'arrêtent, on leur sert à boire: du lao-lao, et hop, c'est reparti.Un tour de la maison des esprits, un tour d'un animal, un verre de lao-lao, un tour de la maison des esprits....
Puis, tout d'un coup, tout s'arrête. Les hommes s'éparpillent, la foule repart vers les stands de la fête. c'est fini...

Aurai-je mal compris? il n'y a pas de sacrifice ?...

Au petit matin, les hommes boivent et
fument...
Je rentre au village bien dépitée, non pas que je souhaitais absolument voir des animaux mourir sous mes yeux, mais j'ai l'impression de n'avoir rien compris à la cérémonie.
Le lendemain matin, on me secoue, il fait encore nuit, il est 5 heures du mat...c'est mon chauffeur de la veille qui à grand renfort de gestes me fait signe de l'accompagner.

les villageois s'assemblent devant
les maisons....
On retourne au village !
Le soleil se lève à peine, le village est presque désert, mais de petits groupes d'hommes palabrent en buvant du lao-lao, parmi eux, les hommes d'hier soir, toujours dans leurs tenues
de cérémonie, ils sont ivres.
Peu à peu, quelques habitants s'avancent vers la maison des esprits, la cérémonie recommence. Identique à celle d'hier soir: chants, danses autour des bêtes toujours attachées à leurs piquets décorés, un verre de lao-lao, danses, lao-lao, danses...certains titubent, fatigue et lao-lao...la danse est un peu désorganisée, mais continue malgré tout.

ravitaillement en Lao-lao...


...avant de reprendre les danses























Puis,tout à coup, les danseurs s'arrêtent,  l'un d'eux lève son épée et transperce un boeuf, l'animal s'écroule.



Ça va très vite, il passe au suivant et recommence l'opération. Les 12 animaux seront sacrifiés en quelques minutes, d'un coup d'épée dans les poumons. Malgré l'ébriété des hommes, le geste est précis, la blessure à peine visible dans le flanc de l'animal.


Le veau n'échappera pas au coup d'épée
 
 Les villageois se précipitent vers les bêtes et versent de l'eau dans la blessure pour les achever, les noyer, en fait, car si les bêtes s'écroulent instantanément, elles ne sont pas mortes.  En même temps, le dépeçage de la première bête commence, c'est un boeuf, les testicules sont découpés en premier et accrochés comme un trophée sur le piquet.





la dépeçage commence toujours
par les testicules
C'est comme un ballet, sur cette grande place autour de la maison des esprits, alors que certaines bêtes sont déjà à terre, le sacrifice continue pour les autres: un coup d'épée, l'eau dans la blessure, le découpage qui commence...

Et le buffle, qui s'agite, a-t-il senti que son heure est proche ?



Le buffle lutte contre la mort









Il sera le dernier a être sacrifié, de la même manière, mais, alors que les autres bêtes se sont écroulées presque tranquillement, il lutte contre la mort, il rue, il se cabre, et dans un nuage de poussière, tente désespérément d'échapper à sont sort avant de tomber.


L'agonie du buffle sacré
Pas d'eau dans les poumons pour le buffle, c'est l'animal sacré, son sacrifice protégera le village des maladies et autres catastrophes.

les plumets de bambous
trempés dans le sang
Il mourra dans la douleur, lentement. Les hommes trempent des plumets de bambou dans le sang qui s'échappe de ses naseaux, les passent aux enfants à l'affût qui s'en emparent et courent les porter à la maison.
Ces bâtonnets de bambou seront accrochés à la porte de chaque maisons pour garantir la chance et
écarter le malheur.


Ce morceau d'oreille est
lancé en mon honneur
Ensuite, les hommes s'approchent et coupent des morceau d'oreille, la bête gémis, elle est toujours vivante!
Les morceaux d'oreille sont lancés dans un petit panier en bambou à environ 6 m en hauteur. Pour la protection du village, pour éloigner les mauvais esprits. Un morceau sera spécialement lance pour moi, pour ma guérison.
Merci.

Son calvaire est terminé










Le buffle étant sacré, sa viande n'est consommée que lors des sacrifices, il sera découpé et partagé entre chaque famille du village. Un morceau sera accroché devant chaque maison pour la protection, le reste sera mangée.

J'ai de la chance. J'ai pu vivre un rare moments d'émotion, je quitte le village en gardant comme dernière image, la majesté du buffle, enfin mort.




vendredi 19 avril 2013

Du Cambodge au Laos





la tenue préférée des femmes
 du Cambodge, le pyjama...










Le krama, foulard khmer





Une frontière, ce n'est qu'une ligne dessinée sur le papier.

Oui mais voila, au moment de quitter le pays, juste avant de découvrir le suivant, je me demande....
 
 
  • Si les femmes de l'autre coté porteront aussi des pyjamas dans la rue? ou le krama ?
  • Si le mode de transport principal sera le tuk-tuk ou la moto?
  • La sieste sera-t-elle aussi sacrée là-bas qu'ici?
le tuk-tuk: une remorque derrière la moto

moto-sieste en attendant le client










  • Si  je trouverai des noix de cajou au marché?
J'ai mis longtemps avant de découvrir
d'où vient ce fruit
noix de cajou sur l'arbre
( sous le fruit)
ici, il y a des plantations mais on ne trouve que les fruits, les noix,
elles, partent directement au Vietnam, où elles seront grillées avant d'être pour la plupart,exportées.






  • Si les temples et les pagodes sont aussi nombreux et aussi fréquentés?
  • Si la corruption règne autant là-bas qu'ici?
  • Si le café sera aussi bon?


Allez, fini les questions sans fin, adieu le Cambodge, direction le Laos.


Le sin, jupe traditionnelle au Laos
Arrivée au poste frontière, il faut d'abord payer 2 $ pour obtenir un tampon de sortie du territoire. Je demande un reçu, bien sur c'est pas possible, les 2$ vont directement dans la poche du douanier. Corruption....c'est juste une façon pour les fonctionnaires sous payés d'arrondir leurs fins de mois. Ensuite remplir une demande de visa, attendre, re-remplir la demande parce que j'avais écris "sans " dans la case emploi...j'écris "voyageur", ça leur plaît mieux, attendre encore, payer le visa 35 $ (je suis contente, la Canadienne devant moi paye 42$ ), avancer à la guérite suivante pour le tampon d'entrée sur le territoire, il faut payer 1 $, je demande un reçu....peine perdue.
Conclusion: autant de corruption dans les deux pays, seul le tarif est diffèrent.


Premières étapes au sud du Laos, et premières réponses à mes questions.

le sin pour les écolières aussi








Les femmes ne sont pas en pyjamas, elles portent le "sin" que l'on appelle en français un sarong (pourquoi?...mystère et boule de gomme...)









Tuk-tuk, pas que pour les humains !


Prête à partir en tuk-tuk,
Manque plus que le chauffeur...
Les tuk-tuk sont bien au rendez-vous, ils sont juste différents. Au lieu d'une remorque derrière la moto, c'est souvent une petite carriole sur le coté, un genre de side-car quoi. C'est confortable, même si dans les virages on a un peu l'impression qu'on va décoller :-)

Pour les plus longues distances, on peut opter pour une version plus
Enfin prêt à partir
spacieuse, mais vite remplie. C'est un compromis entre bus et camion. Il y a deux rangées de bancs qui se font face, et l'allée centrale est généralement réservée aux animaux, aux enfants et aux marchandises que l'on ne peut pas mettre sur le toit (un bac de poisson fermenté par exemple...oui, oui, bonjour l'odeur!).
Ces véhicules ne partent que lorsqu'ils sont pleins, le principe est simple: on monte et on attend le départ. Ça peut prendre plusieurs heures, car il faut aussi attendre que le toit soit rempli.

Le café,  je vous en ai parlé à plusieurs reprise. Ce café glace, noir, fort et sucré, mais au goût incroyable, je suis devenue accro au Vietnam, et j'ai renforcé mon addiction au Cambodge. Le Laos étant lui aussi un producteur de café, je me dis que je vais ici encore, me régaler.
Café à emporter, la paille
dans le sac en plastique
Hélas ! le "café Lao" est une véritable bouillie, épaisse et sucrée à en être écoeurante. Le café lui même est déjà mélangé avec du tamarin, ce qui lui donne un goût aigre doux, puis, lors de la
préparation, il est mélangé à une espèce de poudre brune qui lui donne cette consistance de soupe (Je mène mon enquête, la poudre qu'on y rajoute s'appelle ovaltine...ni plus ni moins que l'Ovomaltine de chez nous) puis, pour finir, on y rajoute du lait concentré... bref, c'est imbuvable !
La seule similitude avec le café du Cambodge, c'est que si vous voulez l'emporter, on vous le sert dans un sac en plastique.


Les temples et la sieste...

D'un coté, les hommes..
...les femmes et les enfants, de l'autre.
Il y a autant de temples ici qu'au Cambodge, et ils font partie de la vie de tous les jours, c'est même un endroit rêvé pour la sieste !
La grande salle commune est bien fraîche avec son sol carrelé, bien mieux que les habitations en bois et bambou pour faire une sieste dès le matin.

Une gargotte au bord du Mekong, elle s'est levée pour me servir,
mais elle me rend la monnaie depuis son hamac
 
Car, ce que je ne vous ai pas encore dit, c'est qu'il fait chaud, très chaud même. Avril est le mois le plus chaud ici, autour de 40 degrés le jour et 30 la nuit. On s'affaire donc au lever du soleil, puis on passe à la sieste, jusqu'au soir...Bientôt, ce sera la saison des pluies, finies les siestes, il faudra aller travailler la terre pour engranger de quoi nourrir les familles pendant une année.
.








samedi 13 avril 2013

ONG et Tourisme humanitaire: les derives



Welcome to the orphanage, Visit our school for poor children ….

On peut voir ce genre de panneau un peu partout au Cambodge. Ça ne vous choque pas ? Vous pensez que c’est plutôt bien, en tant que touriste occidental d’aller visiter un orphelinat pour apporter un peu de réconfort à ces pauvres enfants….Mais allez vous visiter un orphelinat  quand vous allez en week end à Londres ou en vacances à Madrid ?
Les parents confient leurs enfants à ces “orphelinats” car on leur promet un enseignement de qualité et donc un avenir meilleur, parfois ils payent même pour cette prise en charge. Vous avez bien lu le mot: parents. Dans beaucoup de cas, les enfants des orphelinats ont au moins un parent vivant, ce ne sont donc pas des orphelins, et les établissements sont de faux orphelinats.
Les enfants se retrouvent donc séparés de leurs familles, placée dans ces établissements où ils vivent dans des conditions misérables, où l’enseignement est parfois quasiment inexistant. Dans certains cas, sous couvert d'apprentissage d'un métier, on fait même travailler ces enfants dans des ateliers...
Et lorsque vous visitez l’orphelinat, on vous fait comprendre qu’un don serait le bienvenu pour installer l’eau courante ou construire un nouveau dortoir ou acheter des vêtements. Sur la photo de droite, dans un de ces orphelinats, on envoie devant moi une gamine s’epuiser à pomper de l’eau, l’etablissement a besoin de robinets et de sanitaires pour les enfants…..
Les enfants, eux, ne verront jamais la couleur d’une quelconque amélioration puisque ce sont justement leurs pauvres conditions de vie qui entraînent les touristes à donner de l’argent.
Un business bien rodé.
Pire: ils voient défiler à longueur d’annee tout ces occidentaux avec leurs sourires bienveillants “ oh les poooovres, comme ils sont mignons !” les mêmes phrases qu’on prononce en visitant un zoo, on distribue des cacahuètes et on passe à autre chose. Parfois, au zoo, on se dit que les petits singes si mignons seraient peut être mieux en liberté...et les enfants alors ?
C’est une affaire rentable, beaucoup l’ont bien compris et il n’y a pas que les faux orphelinats pour récupérer de l’argent au détriment de la dignité humaine.
Je prends contact avec une ONG qui me semble sérieuse. Elle a été fondée par des australiens qui distribuent de l’eau potable à deux villages. Ils ont aussi construit une école maternelle pour que les mamans puissant aller travailler et ainsi gagner de quoi nourrir leurs familles.  Ils cherchent des volontaires pour les aider.
Je rencontre Ross, fondateur de cette association, nous discutons longuement, je lui dis que je suis prête à m’engager sur le long terme pour une action utile, il me dit que ma candidature l’interesse et me donne rendez-vous le lendemain pour une première prise de contact sur le terrain. Arrivée au point de RDV, je suis bien surprise de trouver une douzaine d’etranger qui attendent avec moi. On doit prendre un mini van qui nous amènera sur place.





distribution d'eau...

Une fois en route, on nous distribue un Feuillet sur lequel sont répertoriées les actions de l’association, quelques consignes sur la conduite à tenir pendant la visite du village, et le tarif: 5 $ par jour. Et oui, vous avez bien lu: un tarif pour la visite des pauvres !
Alors, bien sur, dans ce cas là, l’argent sert à des actions concrètes (concrètes ne veut pas dire utiles). Je constate qu’effectivement, la garderie fonctionne, qu’il y a des crayons de couleur et des jeux pour les enfants ainsi que des lavabos où on leur apprend à se laver les mains avant les repas.  
Mais pourquoi, dans un pays ou la famille est l’element central de la société et où, traditionnellement, les enfants en bas âge restent avec les grands mères devraient-on imposer notre modèle occidental de garderie ? Un jour, ces grands mères auront perdu leur utilité et on les enverra finir leurs jours dans des mouroirs....comme chez nous....

Merci L'ONG !
Et qu’ent est-il de la dignité humaine?  Accepterions nous en Europe, que des étrangers visitent chaque jour l' école maternelle où jouent nos enfants?  Alors pourquoi le faire chez les autres ?
 
... alors qu'il y a un puits et une pompe
Et pourquoi continuer à distribuer de l’eau potable alors qu’il y a une pompe dans le village? Ross me dit que l’eau des nappes phréatiques est polluee….Ne serait-il pas plus utile d’installer des filtres? Il me dit que les filtres demandent de l’entretien et une surveillance constante. Ben oui, justement, former des techniciens pour l’entretien des pompes et des filtres  permettrait aux villageois d’obtenir de l’eau potable et d’etre indépendants, cela leur permettrait de reprendre leur destin en main, d’agir pour leur propre compte, de réaliser  qu’ils peuvent être responsables de leur destin, pas forcement à la merci d’une ONG qui pratique l’assistanat…Inutile de vous dire que Ross – le président de l’association - n’aprecie ni mes questions ni mes remarques.

Des abats jours tournés à la chaîne et destinés aux
touristes
Vous souvenez vous de ce post ou je vous parlais d’une technique bien particulière de poterie sans tour ? Un trésor de savoir faire !
Et bien, dans le village d’ay cote, une ONG est venue apporter son aide occidentale. Certaines personnes ont sans doute jugé que ces pratiques archaïques étaient improductives, et qu’en offrant des tours aux villageois, on leur offrirait une vie meilleure. Résultat: avec des tours on
produit plus, du coup, l’offre dépasse la demande et les prix baissent. Les villageois sont obligés de fabriquer d’autres objets pour compenser le manque à gagner, ils fabriquent maintenant des objets pour touristes. Le prix sont toujours bas, ils doivent donc travailler trois fois plus qu’avant pour gagner la même chose, fini la vie tranquille et la sieste dans le hamac.


Les couvercles des jarres, parfaitement
ronds, fabriqués sans tour, une technique
qui disparaît...grâce aux ONG!

Merci l“ONG!
grâce à vous les habitants ont perdu en qualité de vie et un savoir-faire ancien est en train de disparaître.
L’enfer est pave de bonnes intentions, le Cambodge aussi.
On trouve sur la toile de nombreuses opportunités pour du volontariat. Vous pouvez aller aider les pauvres cambodgiens à construire une école (comme si ils n’etaient pas capable de le faire sans vous), donner des soins médicaux ou enseigner l’anglais dans les campagnes, le tout pour 2000 euros par moi.
Non, non, il ne s’agit pas de rémunération (puisque c’est du bénévolat), c’est vous qui devrez payer cette somme pour avoir le droit d’aller aider les pauvres.  Cela s’appelle du volontourisme, ou tourisme humanitaire.
Les bons sentiments des occidentaux ne sont pas perdus pour tout le monde. C’est devenu un vrai business. On pourrait presque en rire si cela ne se faisait, encore une fois, au détriment des populations locales.
Allez, juste un exemple parmi tant d’autre: http://www.travelworks.fr/volontariat-cambodge.html
Sur cette page, vous verrez que vous en avez pour votre argent. Vous payez votre inscription (ici entre 1500 et 3000 euros pour un mois), puis votre billet d’avion, mais quand vous arrivez sur place, tout est organisé pour vous. On vous fournit même un petit lexique avec des phrases en anglais pour que vous ne soyez pas trop perdu en arrivant. Plutôt utile me direz vous, vu le niveau d’anglais assez médiocre des Francais… sauf qu’en allant un peu plus bas sur la page, on découvre la “mission” don’t il est question: enseigner l’anglais !
Et là, une fois de plus, on comprend que ce sont les jeunes cambodgiens à qui cet enseignement est destiné qui sont les varies victimes de ces pratiques honteuses.
J’ai rencontré deux de ces jeunes français qui ont choisit de payer pour venir enseigner l’anglais à Siem Reap. Leur anglais est plutôt pauvre et leur grammaire carrément approximative, et ils m’avouent eux même ne pas être au niveau pour enseigner, mais ils compensent, me dissent-ils en faisant beaucoup de jeux avec les enfants.
“quels genre de jeux?”
“ On joue au foot, ou pierre cailloux ciseau. Les enfants sont super contents d’etre en classe avec nous.”
Quand je leur dit que les parents de ces enfant se sont parfois endettés pour leur payer ces cours privés payant, ils me disent qu'ils ne sont pas responsables, c’est l’organisation qui les a placés là sans leur donner de programme à suivre.
Et voila: on veut bien aller enseigner aux pauvres, mais on n’est pas responsables. C’est navrant.
Chom n'a plus les moyens d'avoir une maison,
 il vit dans une pièce sans sanitaires.
Son dictionnaire d'anglais est son meilleur ami,
il espère améliorer son niveau pour récupérer son
emploi à l'école privée
Pendant ce temps, Chom est professeur d’anglais dans une école publique. Sont niveau n’est certainement pas meilleur que celui des jeunes français, mais c’est son métier. Il est paye 80$ par moi. Ce n’est pas suffisant pour vivre alors, avant, il donnait des cours privés le soir et le week end pour améliorer son quotidien. Mais c’est bien fini, l’ecole privée a changé son statut, s’est enregistrée comme ONG (très facile à faire, il suffit de graisser quelques pattes),elle utilise maintenant de jeunes volontaires sans aucune expérience ni qualification et se vante auprès des parents de recruter des professeurs étrangers super qualifies. Chom a perdu son revenu complémentaire, l'école fait payer des cours qui sont données gratuitement, cherchez l'erreur
Avant, il y avait donc des cours du soir payants de qualité médiocre, certes, mais des cours d’anglais tout de même, et un emploi  pour un prof local.
Maintenant, il y a des cours (de foot) payants et un emploi local qui a disparu.
Merci le tourisme humanitaire !

En un mois et demi au Cambodge, j'ai entendu bien des témoignages d'abus ou de fraudes, provenant soit des ONG, soit des "volontour-operator". Je ne vous ai rapporté ici que mes propres expériences et rencontres, mais si le sujet vous intéresse, vous pouvez trouver plus d'infos et conseils sur ce site: http://www.thinkchildsafe.org/fr/content/Conseil4/myths-n-realities/orphanage2.html