mercredi 8 août 2012

Tashkent et la vallée de Fergana

Comme je n'aime pas m'avouer vaincue, je refais une tentative de stop. À Boukhara, je demande à une voiture de m'emmener loin sur la route après le dernier village. Là, je me dis qu'il y aura moins de circulation et que les camions comprendront donc qu'il faut s'arrêter.
Dans l'absolu, mon calcul est bon: un camion s'arrête après une dizaine de minutes d'attente. J'ouvre la porte et grimpe dans la cabine.
Je suis accueillie par un grand sourire, une liasse de billets,
- sexe ?
- heu....niet, dasvidania (non, au revoir)

Deuxième tentative, une demi heure plus tard....exactement la même chose.
Bon, j'abandonne.
J'apprendrai plus tard que les routes sont bordées de prostituées Russes!


centre commercial
Ce que j'ai le mieux aimé dans cette expérience, c'est leur grand sourire, au moins ils sont heureux de s'offrir les services d'une p*** !
.
Je prends donc le train pour me rendre à Tashkent, la capitale du pays. Ici il y a un métro, donc facile de se déplacer et de s'orienter (pas de plan de ville disponible) sauf que pour descendre l'escalier, il faut d'abord passer au détecteur de métaux.
Au moment de passer le portillon d'entrée du metro, un autre policier m'arrête, demande mon passeport, puis décide de fouiller mon sac. Me voila donc entrain d'étaler mes affaires sur une petite table alors que les autres usagers me dévisagent.
Registration ?
Il faut aussi que je produise mes tickets d'enregistrement (ici on doit se faire enregistrer chaque jour).

Le sénat à Tashkent
J'avais presque oubliéeque l'Ouzbekistan est une dict***re, donc un état policier. Les contrôles sur la route sont fréquents, mais là, en ville, c'est à chaque carrefour que l'on risque un contrôle...surtout lorsqu'on porte un sac à dos !
Une fois débarrassée du sac, je passe plus inaperçue et je ne serais arrêtée qu'une fois sur deux, ouf, c'est mieux.
Je suis venue à Tashkent pour mes visas ....et oui, encore des visas !
Je n'ai pas demandé mes visas Tadjik et Kirghize à Teheran car j'étais à cours d'argent, et les visas, ça coûte cher !
Il faut aussi que je me préoccupe du visa chinois....

Arrivée à l'ambassade du Tadjikistan avant l'heure d'ouverture, il y a une cohue sans nom, les gens se pressent contre le portail. Il faut camper sur ses positions et ne pas céder un millimètre de terrain, si un coude s'immisce entre vous et la personne de devant, c'est fichu, ça pousse dans tous les sens et vous avez perdu deux ou trois places dans la file (enfin, dans l'amas de chair humaine) en moins de 5 minutes!
Finalement, à l'ouverture des portes, les gardes me feront passer parmi les premiers, ouf !
Paperasse en cyrillique, mais un employé de l'ambassade traduit pour moi, puis dépôt de la demande. J'en profite pour demander si les frontières avec le Kirghiztan sont ouvertes ( suite aux récents évènements dans la région du Badkchan), mais on me dit qu'il n'y a aucun problème au Tadjikistan, tout va bien.
Bon, je sais que ça n'est pas vrai et que cette région a été fermée aux étrangers qui ont d'ailleurs été évacués. Autant pour les infos à la source !

entrée de jardin public
J'enverrai donc un mail à l'ambassade de France à Dushambe, mais leur réponses est vague: "les informations circulent mal ici, mais vous devriez pouvoir passer au Kirghiztan" ( admirez le conditionnel)...Dans un deuxième mail, je leur demande des précisions sur tel ou tel poste frontière, telle ou telle route, en expliquant bien que je passe les frontières à pieds, et qu'il est donc important pour moi de savoir comment sortir du pays...... j'attends toujours la réponse ! merci l'ambassade de France !

Les ambassades et consulats n'étant ouvertes que le matin, j'ai du temps pour visiter la ville.

pub à la gloire de l'armée...
C'est moche, rien a voir si ce sont quelques bâtiments officiels surdimensionnés, des panneaux à la gloire du président et de l'armée et des magasins type soviétiques ou l'on vend du PQ à coté des képis militaires....

...ou du gouvernement
Je me rends ensuite à l'ambassade du Kirghizstan, bonne nouvelle ! il n'y a plus besoin de visa.
Ça date de quelques jours seulement, super !

Pour le visa Chinois par contre, c'est plus compliqué.
magasin d'état, le Pq, les képis...peu de marchandises
et peu de clients !
Il faut des tonnes de papiers pas évidents à réunir quand on est loin (attestation de banque, d'assurance entre autre), mais il faut aussi une réservation de billet d'avion (officiellement il est interdit d'entrer à pieds) une réservation d'hôtel et une lettre d'invitation qui ne peut être délivrée que par une agence chinoise. Tout ça a un coût, bien sur, mais en plus, on est pas sur d'obtenir le visa car les Chinois (enfin, le gouvernement) a pris les français en grippe à cause des visites fréquentes du Dalai Lama dans notre pays.
Cerise sur le gâteau, si on obtient le visa, il n'est valable qu'un mois. Je ne suis pas sure d'arriver en Chine dans un mois, donc finalement je renonce, je le ferai à Bishkek (Kirghizstan).


La cour de la madrassa, les voiles qui apportent
de l'ombre aux étudiants donnent une lumière rose tres douce.
Je dois revenir chercher mon visa Tadjik dans une semaine, je décide donc de partir dans l'Est du pays, visiter les régions plus vertes de la vallée de Fergana.
À Kokand, je rencontre Sherzat. il a 28 ans, est prof d'anglais mais son niveau est faible, il en est conscient et veut pratiquer la langue.
C'est bien volontiers que je passe la journée avec lui. Il me fait visiter sa ville où les touristes sont rares. Nous irons ensemble visiter la mosquée du vendredi et la madrassa. C'est une école qui est en fonction. Ça me change des bâtiments transformés en musées !

Autre région, autre cimetière,
bien diffèrent de celui de Kojeli
Ici le lieu est plein de vie, et je regrette juste d'y être un vendredi, jour où il n'y a pas de cours.

Dans le cimetière tout proche, il me présente aux "Shamana" qui soignent sur des bancs dehors. Les explications sont laborieuses, parfois difficiles à comprendre, mais en gros, elles éloignent les forces du mal qui vous rongent. Chacune a sa spécialité et sa technique, et, mieux que des mots j'aurai droit à une démonstration sur ma personne, pour éliminer mon mal de dos, qui n'est pas très important, mais ça fait plaisir à tout le monde: elles se dispute pour savoir qui me soignera ! De grandes claques sur la tète et dans le dos (ça fait mal!) et puis on me tire les pieds tout en psalmodiant des genres d'incantations, pour que le mal sorte par là !

Elle applique des petites poches
remplies d'on ne sait quoi...
Elles sont musulmanes, nous sommes dans un cimetière musulman, juste derrière la grande mosquée...mais elles sont aussi "Chamana", ça n'a rien à voir avec la religion d'après ce que je comprends, plutôt un peu comme des guérisseuses.


une Chamana à l'oeuvre, celle ci ne soigne
que les femmes
Les paroles qu'elles murmurent sont secrètes, ainsi que le contenu de certains pochons qu'elles appliquent parfois sur leurs patients.

Sherzat est très curieux à propos de la vie en Europe. Il ne comprend pas que je vive et voyage seule. Lui s'est marié l'année dernière avec un jeune fille (10 ans de moins que lui) que ses parents ont choisie pour lui. Il en est très heureux et me dit qu'il aime sa femme qui vient d'avoir un bébé et qui reste à la maison pendant qu'il travaille pour faire vivre le ménage. De toute façon, elle n'a aucune éducation, que pourrait-elle faire d'autre. Quand je lui suggère qu'il pourrait lui apprendre l'anglais, vu que c'est son métier, il me regarde avec un air ahuri. Il n'y a même jamais pensé et ne voit pas pourquoi il ferait ça....Il me dit qu'elle ne voudrait sûrement pas, de toute façon.
Un gouffre nous sépare !

Je pars ensuite vers Fergana, plus loin dans la vallée. La ville a peu d'attraits et je serais repartie rapidement si je n'avais rencontré Shovkat, qui m'invite dans son village à 30 km de là. Sur la route, je m'émerveille devant les vignes qui forment des tonnelles devant chaque maison de la vallée, les grappes sont énormes ! Shovkat rigole, il me dit que chez lui elles sont plus belles.


le the et le pain, premier signe de bienvenue
en quelques minute, la table se remplit
Nous arrivons au village à la nuit tombante, il me présente une partie de sa famille et à ses amis à chaque étape, en quelques minutes, la table se remplit: thé, pain, pastèques, biscuits, bonbons, salades Hanoum...et à chaque maison il faut manger et faire honneur à ce qui est offert ( et voila comment on prend des kilos en voyageant !)


une plate forme en bois où l'on mange
l'endroit où l'on dort
La maison de ses parents, comme les autres maisons du village se compose de pièces disposées autour d'une cour dans laquelle se trouve des plate formes sur lesquelles on mange et on dors. Pour la nuit, on installe des "moustiquaires" qui sont, en fait, juste des draps suspendus, résultat, j'étouffe là dessous, j'écarte le drap pendant la nuit et je suis attaquée par les moustiques énormes. Je dors peu, et je me retrouve au matin, défigurée par les piqûres de moustiques qui sont aussi très douloureuses....ça les a bien fait rire !



les toilettes
Le "lavabo" dans la cour















Les toilettes sont au fond de la cour et il n'y a pas de salle de bain. Le matin, ils font chauffer de l'eau qu'ils versent dans le "lavabo"" pour que je puisse me débarbouiller. Ce n'est que pour moi car normalement en été, ils n'utilisent que de l'eau froide, l'eau chaude c'est pour l'hiver.

Ces gens vivent dans des conditions que l'on imagine même pas chez nous, mais ils sont heureux.

Les parents de Shovkat devant
la fidèle Lada, sous la généreuse treille
Ils ont leur jardin un peu plus loin dans le village, quelques moutons dans la montagne et une vieille lada (36 ans) pour que Shovkat puisse aller à la ville, ils font partie des gens aisées, ils aiment leur vallée et même Shovkat qui est instruit n'imagine pas vivre ailleurs ou autrement.




1 commentaire:

  1. Je regarde sur une carte ton avancée, la Chine s'approche. Je suis vraiment impressionnée: sacrée nana! quel courage et quel mental! car il en faut pour faire ce que tu fais.
    Tu diras si ce que t'a fait la chamana fut efficace

    A bientôt marie

    Murielle

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